Replacer les compositrices et compositeurs vivant·e·s au cœur des institutions symphoniques
- Communiqué
- mardi 29 juin 2021
Le SMC publie un rapport s’appuyant sur une large enquête qui décrit les grandes tendances de programmation de douze orchestres majeurs du paysage symphonique français sur la période 2017–2020 et qui vise notamment à faire entendre la voix des compositrices et des compositeurs vivant·e·s auprès de la mission relative au secteur symphonique permanent menée par Anne Poursin et Jérôme Thiébaux. Huit grandes préconisations concluent ce rapport et proposent des solutions pour améliorer la place de la musique contemporaine et de ses acteurs au cœur du projet des institutions symphoniques.
L’orchestre est une institution majeure du paysage culturel et constitue pour la compositrice ou le compositeur un outil essentiel à l’épanouissement de son art. Si le concert symphonique était jadis une place forte de la création, force est de constater que désormais, orchestre et compositrices-compositeurs n’entretiennent plus la même proximité qu’auparavant.
Les résultats accablants de l’enquête du SMC montrent que les orchestres jouent, pour l’écrasante majorité de leur répertoire, des œuvres écrites avant 1950.
Seules 2 % des œuvres jouées sont des créations.
Depuis quelques décennies, l’orchestre a diversifié son répertoire : le jazz, la chanson et les musiques de film ont intégré le répertoire orchestral. Ajoutés aux extraits d’opéras, d’opérettes ou les comédies musicales, les genres « non-symphoniques » prennent désormais une place croissante dans la programmation et sont davantage valorisés par des reprises en concert.
A contrario, les musiques symphoniques « traditionnelles », en particulier celles écrites après 1950, semblent de plus en plus menacées de disparition.
Ni considérée comme un genre à part entière, ni envisagée comme le prolongement des musiques classiques, la musique contemporaine occupe une place bancale dans la programmation et se trouve trop souvent reléguée dans les festivals spécialisés. De plus, elle souffre d’un déficit de promotion, à tel point que lorsqu’elle partage l’affiche avec des œuvres classiques, les œuvres contemporaines ne sont parfois pas mentionnées dans les notes de programme.
Historiquement la composition musicale s’est révélée être une discipline presque exclusivement masculine. Cependant, malgré la volonté de l’ensemble des actrices et acteurs du monde musical de corriger ce déséquilibre, les actes ne suivent pas vraiment :
- moins de 10 % des occurrences d’œuvres écrites après 1950 programmées ont été composées par des compositrices ;
- pire encore, sur douze orchestres et en trois saisons, une seule compositrice de moins de 40 ans a obtenu une commande : ce fait est tout simplement incompréhensible.
Enfin, alors que l’écrasante majorité des chefs-d’œuvre symphoniques reconnus comme tels ont été écrits avant l’âge de 40 ans, les jeunes compositrices et compositeurs ne représentent que 21 % des créations.
Les musiques contemporaines, aux sens de la recherche et de l’expérimentation ne peuvent être placées sur un pied d’égalité avec les musiques soutenues par certaines industries et circuits commerciaux. L’exigence et le temps long qui accompagnent la production d’une partition contemporaine ne peuvent en aucun cas se conformer à des logiques de rentabilité et à la vision à court terme du « marché musical ».
Le rapport du SMC tient à rappeler que pour se renouveler la musique a besoin de créatrices et de créateurs : l’expérience de nouvelles sonorités et la prise de risque artistique doivent être un paramètre à prendre en considération dans les décisions programmatiques.
Pour améliorer la présence de la musique contemporaine et de ses créatrices et créateurs, le SMC préconise notamment :
- de programmer davantage d’œuvres composées après 1950 et de manière équilibrée sur l’ensemble de la saison ;
- programmer plus de créations et ce de manière plus régulière ;
- de valoriser les créations en mettant davantage en avant le travail de la compositrice ou du compositeur dans les notices de programme, en les jouant au moins deux fois par concert et en prévoyant des reprises 3 à 5 ans après les premières ;
- de renforcer les politiques de résidences en s’appuyant sur une convention type de résidence ;
- de porter une attention particulière à la diversité, aussi bien dans la parité entre les compositrices et les compositeurs que dans l’équilibre entre les différentes générations ;
- d’accorder systématiquement le temps de répétition nécessaire pour que chaque œuvre nouvelle soit créée dans les meilleures conditions artistiques possibles ;
- d’engager une réflexion sur la rémunération des commandes.